Déconjugalisation

La déconjugalisation de l’Allocation adulte handicapé (AAH), entrée en vigueur au 1er octobre, est souvent présentée comme le gage de l’autonomie financière des personnes handicapées, notamment des femmes. C’est important : surtout quand on sait que 80 % des femmes handicapées sont victimes de violences intrafamiliales. Cet aspect des choses pourtant me paraît tout à fait illusoire pour trois raisons majeures : le montant de l’AAH (971,37 €) ; la pénurie généralisée de logements, et particulièrement de logements accessibles UFR (usagers de fauteuils roulants) ; le fait que toutes les autres aides, comme l’APL (aide personnalisée au logement), sont toujours attribuées sous conditions de ressources du ménage. Je pourrais en rajouter une quatrième pour les personnes handicapées qui ont besoin d’une aide technique et humaine conséquente : il est assez rare que celle-ci soit intégralement financée et l’intervention de l’entourage notamment familial est souvent indispensable.
Dans ces conditions, je pourrais peiner à me réjouir de cette mesure. Pour autant, je m’en réjouis, car à ma connaissance, en droit français, c’est bien la première fois que l’individu prévaut sur le ménage. J’ai beaucoup écrit à l’occasion du vote du mariage pour tous que j’aurais préféré que la communauté homosexuelle revendique dans toutes les sphères de l’existence un droit personnel, qu’il s’agisse de droits sociaux, patrimoniaux, fiscaux… plutôt que de vouloir intégrer un statut marital coercitif, stade ultime de son désir de conformité.
Les personnes handicapées, qui sont au cœur de l’aboutissement de la déconjugalisation de l’AAH, ont donc fait preuve de beaucoup plus d’intelligence et de résistance à l’oppression que ne l’a fait la communauté homosexuelle. Il est vrai que l’aspiration à la conformité, même si elle n’est pas étrangère a beaucoup de personnes handicapées, se situe pour elles à un niveau différent, celui de la revendication d’une société inclusive donc accessible, là où la communauté LGBT a cru que cette conformité lui garantirait l’impunité en faisant reculer l’homophobie. Elle a vraiment perdu sur tous les tableaux !

NB : Si vous souhaitez soutenir des militants politiques contre le validisme, je vous invite à soutenir l’association Handisocial dont je suis membre.

 

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