Le suicide de Lindsay, une collégienne de 13 ans, suite au harcèlement scolaire dont elle a été la victime fait couler beaucoup d’encre. L’émotion porte à tous les commentaires, toujours très factuels sans qu’une véritable analyse des phénomènes de violence portant des enfants à harceler d’autres enfants ne soient analysés. On entend notamment de plus en plus de commentateurs professionnels parler de sanction (pénale) des auteurs, quel que soit leur âge, sans qu’une réponse éducative ne soit proposée. On accuse, les enfants violents, les portables, les enseignants, les réseaux sociaux, les parents parfois, l’administration… on accuse. On ne s’interroge pas.
Des enquêtes administrative et judiciaire vont avoir lieu. Des responsabilités directes seront établies. C’est une bonne chose. Mais à chaque fois qu’un fait majeur de violence émerge, je pense à une phrase de Daniel Cohn-Bendit dans un meeting électoral du siècle dernier qui disait (j’arrange) que la violence commence dans le système économique et aboutit dans les quartiers (c’était un temps politique avec des violences urbaines). Nous sommes tous sous pression de l’ordre bourgeois, hétérosexiste, raciste et validiste : toujours plus de performance, d’efficacité, de domination pour le seul bénéfice d’une toute petite partie des humains.
Les enfants n’y échappent pas. Ils reproduisent ce qu’on leur apprend, la soumission à un ordre ultralibéral qui les opprime avec un œuf Kinder (trop gras, trop salé, trop sucré, donc délétère) en récompense. Ils sont les premières victimes des violences intrafamiliales, des violences sociales, éducatives… panpan cucul, cela laisse des traces et ne porte pas à l’amour de son prochain. Combien d’exemples de relations sans violence leur sont donnés ? Comment développer des méthodes éducatives qui changeront le monde ?
On est en très loin et je ne remarque ni sur la scène médiatique ni à la caisse des supermarchés des adultes qui pratiquent la pédagogie par l’exemple. Pire, à mon sens : la passivité collective face à ce consensus mou (au travail, à la maison, à l’Assemblée nationale, à l’Élysée, à la télé, sur les réseaux sociaux…) qui avalise l’idée que pour exister à peu de frais, il suffit d’opprimer les autres. Que faisons-nous chacun, déjà dans nos relations avec les autres, dans ce que l’on regarde ou pas à la télé, dans ce que l’on dit (et lit) ou non sur les réseaux sociaux ?
Le jeune homme condamné pour avoir harcelé Hoshi « estimait n’avoir rien écrit « de diffamant » ni de menaçant, évoquant quelques « paroles en l’air » ou « des messages peu cordiaux ». Il avait expliqué avoir voulu « se défouler » car il ne « se (sentait) pas bien » et s’était étonné que les enquêteurs l’aient « retrouvé ». » [Le Monde]. Et que sont les arguments de C8 qui paie très cher un présentateur vedette pour insulter, diffamer, attiser les violences quand elle est condamnée sans appel ?
Ce monde, nous en sommes tous acteurs ; reste à chacun à choisir son camp.