Qualification

Je dénonce régulièrement la dégradation de la qualité de l’information, même celle donnée par les médias publics ou la presse écrite. Je vais être obligée de continuer. À l’occasion de la publication des résultats du premier tour des législatives, j’ai remarqué dans une copie d’écran que m’a envoyé Isabelle que Libération utilise le terme de « qualifié » pour signaler les candidats qui peuvent se maintenir au deuxième tour. Il en est de même dans Sud Ouest et j’imagine de nombreux autres.
D’emblée, ce terme de « qualification » m’a plus fait penser aux Jeux olympiques qu’aux élections législatives. Il correspond tout à fait à l’état d’esprit général qui considère l’élection comme une compétition plutôt qu’un choix démocratique des orientations politiques du pays. Je suis tout de même allée vérifier dans le Code électoral qui me confirme que l’on parle de maintien au deuxième tour et non pas de qualification pour le deuxième tour.
Ce choix sémantique renforce donc l’idée qu’il y aurait en politique des compétiteurs, avec leurs supporters, et que l’objectif serait de désigner le gagnant, comme si les fonctions électives équivalaient des médailles. On me dira que c’est une métaphore possible. Pourquoi pas ? Mais cette métaphore serait valable si elle s’accompagnait de l’idée qu’il s’agit de l’avenir du pays et non pas de désigner un vainqueur dont on ne sait finalement pas grand-chose, à part qu’il aurait battu ses adversaires.
Je ne crois pas que les partis politiques soient directement responsables de cela. Chacun porte un projet et souvent, si l’on écoute bien, on remarque que les leaders de chaque mouvement peinent à faire valoir leurs propositions face à des journalistes qui tournent plus sur la compétition elle-même que sur le contenu des projets politiques de chacun. Bien entendu, à ce petit jeu, ce sont les populistes qui gagnent. Et aujourd’hui, les populistes qui gagnent c’est l’extrême droite.
Une élection n’est jamais pliée d’avance et j’espère que le deuxième tour permettra de renforcer le Nouveau Front populaire dont le projet politique constitue un vrai projet de société de gauche. Est-ce cela qui fait que le président, ses quelques soutiens, les droites et l’extrême droite le taxent d’« extrême » ? Souvenons-nous de ce qu’il était dit du « gauchisme » de François Mitterrand avant son élection, et deux ans plus tard… Souvenons-nous.

NB. Si « maintenable » est un mot trop compliqué, « maintien » fera parfaitement l’affaire.