Coming out

Je suis malade.
Après six mois de pas-très-bien, une IRM de routine mi-janvier 2023 a provoqué une réaction en chaîne : médecins, analyses, imageries… quinze jours (c’est objectivement court mais c’était intensément angoissant) avant qu’un diagnostic ne soit posé, immédiatement suivi d’une prise en charge hospitalière d’une qualité qui ne se dément pas depuis fin janvier.
Après un petit détour par de la chirurgie cervicale de haut vol qui a sauvé ma mobilité à long terme, j’ai signé fin février un protocole de recherche clinique et fréquente assidûment un hôpital de jour et des professionnels de santé « de ville » pour accompagner les traitements (costauds les traitements ! j’ai même songé aller faire la peau de mon médecin début mars ; l’asthénie l’a prémuni du pire).
Je suis ainsi passée de l’effroi à la sidération avant que, fin mars, l’amélioration de mon état de santé (physique et moral) ne me permette d’entamer le doux chemin de la résilience. Les traitements sont très efficaces. Un retour très progressif mais déterminé vers l’activité physique (marche, petits exercices), une alimentation adaptée, beaucoup de sommeil, et l’amour inconditionnel de la joyeuse bande formée par mes amis secondés par mes voisins m’a permis un retour à la vie sociale pour recevoir la médaille de la Ville de Paris le 19 avril dernier.
Mes amis, mes voisins, parlons-en. Je suis au cœur d’une ronde qui me porte et m’emporte, sans que jamais la joie qui la motive ne soit entamée par l’angoisse. Je ne sais pas comment ils font, mais ils (elles surtout) sont là sereins, aimants, apportant des solutions à chaque problème, me nourrissant (au sens propre et au sens figuré), accompagnant chacun de mes pas en avant, chacune de mes larmes, réduisant le pire à la portion congrue, fortifiant ma propre énergie d’un amour vivifiant.
Mon émotion est vive à les évoquer, comme à écrire ce billet en forme de coming out, presque plus compliqué que ceux que j’ai pu faire sur mon homosexualité car dire « Je suis malade » porte à donner des détails et surtout, des « nouvelles ». Pour l’heure, ici, je n’en donnerai pas car cela n’est pas très important ; vous aurez remarqué que le rythme de mes billets n’a jamais diminué ; et que j’ai réussi à garder un œil aiguisé sur le monde. J’ai voulu aujourd’hui ce billet avant tout parce que je vais mieux et parce que je veux pouvoir évoquer certains sujets qui auront besoin d’être contextualisés.
Et pour ce qui est de la maladie, si elle recule déjà, il faudra encore huit mois et des moments difficiles pour la considérer en rémission, pour reprendre l’entraînement judo et passer mon 2e dan (le chirurgien l’a promis !) en attendant une récidive dont le principe me semble acquis sans que l’échéance n’en soit fixée. Je ne me suis jamais sentie aussi vivante, aussi déterminée à savourer la moindre joie, aussi sévère quand d’aucuns cherchent à me faire porter des angoisses qui leur sont propres, aussi tendre à l’inverse pour accueillir le moindre ravissement.
Hajime !

Je pose en kimono dans mon dojo, tapis bleus et mur protégé par de la mousse verte. Je porte un masque mais ma fierté transpire.
[En photo, 9 mai 2023 : reprise des cours de judo aux enfants ; fière que je suis ! Et déterminée.]