Cela fait des années que je ne fais plus de commissions le soir après 19 heures, les dimanches et jours fériés, avec la conviction de défendre les droits des travailleurs. On me rétorque souvent que cela rend service à des étudiants ou à des personnes sans emploi stable de pouvoir travailler ces jours-là ; on me sert également l’argument du libre-choix de son temps de travail voire de l’impossibilité pour certains de faire leurs courses à d’autres moments. C’est ignorer là les journées à rallonge (quelques heures le matin, quelques heures en fin de journée), le principe de subordination du contrat de travail, et l’aliénation des consommateurs eux-mêmes. C’est également accepter que le sur-travail choisi d’un côté de l’échelle sociale soit payé par du sur-travail non choisi de l’autre côté, avec dans les sous-sols de ladite échelle celles et ceux qui font les heures les plus contraignantes et les moins bien payées.
Je fais donc le choix d’une société où la consommation est suffisamment raisonnée et le temps de travail contrôlé pour que se crée un équilibre dans le partage équitable du temps, de l’espace et des richesses. C’est dans ce contexte que je me suis trouvée démunie pour aller récupérer avant le 2 novembre inclus du jus de citron que j’ai « gagné » (entendre que j’ai payé dans la marge bénéficiaire de ce commerce) lors d’un achat. Le délai est court. Et le 1er novembre, en plus du dimanche, me contraignait.
J’ai néanmoins opté pour ce jour férié, en décidant de ne rien acheter et de passer en caisse avec ce seul citron pressé. Perdu ! Impossible de récupérer mon « cadeau » sur un « ticket vide » a dit le caissier. J’aurais dû m’en douter… Je suis repartie les mains vides comme le ticket, ou presque ! En chemin, j’ai croisé un gars qui donnait des pommes pour faire la promotion d’un site Internet « produits du marché livrés en une heure ». Il m’en a donné deux. Délicieuses !