Une nouvelle publication sur « le plaisir Lesbien » a fait l’objet de quelques articles. Je prends une chronique du Monde, qui commence ainsi : « Les plus conservateurs n’en dormiront pas de la nuit : 86 % des lesbiennes atteignent toujours ou régulièrement l’orgasme lors d’un rapport sexuel, mais seulement 65 % des hétérosexuelles. » Je remarque d’emblée que la référence au conservatisme méconnaît tout à fait cette idéologie. À ma connaissance, un conservateur ne s’intéresse pas au plaisir des femmes : qu’elles soient homos- ou hétérosexuelles, sa préoccupation principale est qu’elles fassent des enfants. Ma deuxième réaction sera de constater que ce qui apparaît comme un scoop est un vieux marronnier.
Qu’importe ? Ce n’est pas moi qui vais m’opposer à la diffusion de l’idée selon laquelle les lesbiennes ont une sexualité épanouie. Je lis donc la suite de la chronique (je sais, sa lecture est réservée aux abonnés… mais n’est-il pas temps que l’on arrête de consommer de la presse gratuite au péril de la qualité de l’information ?) Les axiomes définissant la spécificité du plaisir lesbien sont au nombre de cinq :
1. Prendre son temps
C’est indéniable, les relations sexuelles entre lesbiennes prennent du temps. Par envie de le prendre (hypothèse de la chroniqueuse) ou par nécessité ? Je souris et pense que toutes les lesbiennes qui ont fait face à un clitoris sourient avec moi. Comprenne qui voudra, je ne souhaite pas casser le mythe !
2. Zéro pression
Les lesbiennes ne seraient pas obsédées par l’idée de jouir… Ce n’est pas faux, mais cela est peut-être un peu contradictoire avec l’idée qu’elles ont plus de plaisir que les hétérosexuelles, non ? Qui plus est, j’ai pu remarquer que dans le couple lesbien, le désir est compliqué à (se) maintenir… alors forcément, la pression tombe vite !
3. Casser les codes
Faute de représentations, les lesbiennes seraient plus créatives. Là, franchement, je ne sais pas de quoi on parle. J’avais listé pour Cul nu, courts érotiques toutes les pratiques possibles ; elles ne sont pas si nombreuses et, dans la « vraie vie », je n’en ai jamais rencontré autant. Mais ma vie sexuelle n’est pas terminée ; j’espère. Alors ? Alors ?
4. Pénétrer… ou pas
La pénétration ne serait pas le Graal des relations sexuelles lesbiennes. C’est exact. Et ? La chroniqueuse nous explique que, pour le coup, les autres pratiques sexuelles sont « à égalité ». Sans doute. Et c’est peut-être là que se situe l’avantage majeur dont dispose la sexualité lesbienne quoique le plaisir clitoridien est parfois érigé en dogme ; ce qui rompt ladite « égalité des pratiques ».
5. Prendre les devants
Oulala ! Les relations lesbiennes seraient « plus fluides » car les deux partenaires peuvent échanger leur rôle en matière de pénétration notamment. Et la chroniqueuse de conclure : « Ce n’est pas toujours la même qui pénètre, qui engage le rapport ou qui domine ». Quelle piètre analyse que voilà de la question du pouvoir, de la domination… Ce serait celle qui pénètre qui domine ? C’est cela qui est sous-entendu, bien loin de toute analyse politique a minima des rapports sexuels.
Je ne dis rien sur le livre, je ne l’ai pas lu et je ne le lirai pas parce que La Déferlante ne produit pas ses livres en format ePub, privant ainsi les déficients visuels de leurs excellentes publications. C’est agaçant de constater comment on peut pourfendre une domination (le sexisme) en en perpétuant une autre (le validisme)… Ce n’est pas le sujet. Quel était-il ? Ah ! oui. Le plaisir lesbien. Qu’il fasse parler de lui, finalement ; en espérant que les lesbiennes ne soient pas trop inquiètes d’être érigées en superhéroïnes du plaisir. Non ? Mais si, puisqu’on vous le dit !