Depuis quelque temps, l’adjectif « participatif » permet de qualifier un certain nombre d’évènements notamment des repas, des apéros, des buffets… Autrefois, dans le milieu associatif ou personnel, on disait simplement d’apporter quelque chose, ce que chacun faisait toujours très volontiers sans qu’il soit besoin de le demander d’ailleurs. Dans les grandes fêtes, familiales ou amicales, il est de coutume d’apporter une bouteille, un gâteau… Désormais, ce sont des collectivités publiques qui invitent au « participatif ». Cela a commencé avec une nouvelle vision de la démocratie locale (jardinage participatif, nettoyage des rues participatif, budget participatif…) et cela s’est propagé dans beaucoup de secteurs avec des « ateliers » dont il est souvent difficile de cerner le contenu, et maintenant dans les apéros, les buffets et les repas.
Il est vrai que dans un petit village avec un budget municipal réduit on peut comprendre que l’inauguration d’un équipement qui a déjà coûté cher aux finances locales puisse faire l’objet d’une sollicitation des citoyen·nes afin que la cérémonie ne grève pas un peu plus le budget de la collectivité. C’est d’ailleurs dans une toute petite commune que j’ai été invitée récemment à l’occasion d’une inauguration à apporter quelque chose pour un buffet participatif, en l’espèce le 14e arrondissement de Paris, ville olympique, 136 000 habitants. Le quartier concerné fait partie d’un périmètre politique de la Ville ce qui invite à penser spontanément que les habitants ont tout à fait les moyens de participer à ce buffet plutôt que de concentrer leurs maigres ressources à leur maisonnée. Quant à ce qui est généralement jeté à l’issue de ces buffets… passons.
C’est sans doute dans ce sacrifice que cette participation prend sa force politique. À ma connaissance, personne dans le quartier n’a demandé la rénovation de ce square. Elle a eu lieu et le résultat est très satisfaisant même si les trafics, dégradations et agressions ont repris dès sa réouverture. L’objectif était d’en faire un lieu d’échange plus que de passage ; la nouvelle configuration peut laisser espérer que ce soit le cas en dépit de traditions locales en matière d’échange qui ne sont pas dans les objectifs de la Ville (du moins, je crois). Si les habitants offrent un repas aux représentants de la ville et aux élus à l’occasion de cette inauguration, ne vont-ils pas symboliquement signifier leur attachement à ce projet jardinier éminemment politique, permettant ainsi à l’équipe municipale de tenter la participation à peu de frais (de bouche) ?
L’avenir nous le dira. En attendant, nous sommes un certain nombre à considérer que la mairie du 14e se moque un peu de nous ; ce n’est pas si grave, nous en avons l’habitude.