J’aime beaucoup Serges Reggiani, particulièrement certaines chansons comme Sarah. Je la chante volontiers en même temps qu’elle passe dans ma Playlist, marmonnant quelques paroles. J’aime cette image d’une femme qui a vécu et qui est belle, désirable, justement par ce qu’elle a vécu. J’aime m’identifier au chanteur et rêver de la rencontrer, cette femme qui « n’a plus vingt ans depuis longtemps », aimer ce corps « usé par les baisers », désirer ce « corps lassé »…
J’étais dans le train, à mon retour d’Avignon, casque sur les oreilles et j’entends la toute fin de la chanson « Et c’est son cœur / Couvert de pleurs / Et de blessures / Qui me rassure ». Qu’est-ce à dire, que c’est la souffrance de cette femme que son corps exprime « qui me rassure » ? Mais de quoi, grands dieux ? Faudrait-il que l’autre (une femme) ait souffert, qu’il en soit marqué, pour me (un homme) rassurer de… je ne sais pas ; de moi ? Et pourquoi ce besoin d’être rassuré ? Et que fait-on quand on ne l’est pas ? Quelle horreur (machiste) !
Je l’ai écoutée tant de fois cette chanson, sans entendre. Nous sommes le 25 novembre, Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. Je pose là ces questions, sur ce seul vers d’une chanson. Peut-être que je me trompe dans mon interprétation ? Sans doute que je continuerai à aimer cette chanson, à rêver d’une femme dans mon lit qui attise mon désir, à espérer être cette femme qui attise celui d’une autre, parce que le désir, justement, au contraire de me rassurer m’affole, m’agite, m’alarme, m’ébranle, m’effraie, m’émeut, m’inquiète, m’intimide, me menace, me préoccupe, me terrifie, me trouble.
Et que c’est cela que j’aime.