[Archives 2010-2022]
Alors que je marche dans la rue, je suis ralentie par un vieux monsieur qui tire difficilement son caddie. Un homme l’interpelle ; à l’évidence, ils se connaissent.
— Ils ont pris toutes les pâtes et le riz !
— Y a plus rien ?
— Non, comme au confinement.
Je n’avais pas remarqué que ces rayons avaient été dévalisés dans mes magasins. J’imagine que la guerre en Ukraine en est la cause et, pour avoir lu ces derniers jours La force de l’âge de Simone de Beauvoir, faire des stocks en temps de guerre ne semble pas si absurde. Je ne compte pas, pour autant y céder. J’ai deux packs d’eau dans ma cave, mon catakit crue et l’expérience du confinement m’a permis de prendre conscience que j’avais de quoi manger pour au moins deux ou trois semaines, le temps de se retourner.
Je remarque d’ailleurs que j’ai beaucoup moins de stocks qu’avant le premier confinement. Je ne m’étais alors pas précipitée dans les magasins, craignant la foule apeurée donc violente et vécu plusieurs jours sur ce que j’avais sans sensation de manque. Quand j’y suis retournée, beaucoup de rayons étaient vides, mais aucun de ceux que je fréquente, les fruits et légumes restant largement disponibles. Ce n’est que quelques semaines plus tard que les farines T45 et T65 se sont mises à manquer avec un réassort laborieux. Les farines T110 et supérieures sont toujours restées disponibles.
J’ai tiré plusieurs enseignements de cette expérience et réduit mes achats anticipés avec l’idée de réduire à zéro la nourriture que je pourrais jeter (parce que périmée, ou attaquée par des mites, ou altérée par une coupure de courant, etc.) :
1/ Mes contemporains se ruent d’abord sur les produits transformés ; comme je n’en consomme pas, cela me laisse le temps d’acheter des ingrédients de base.
2/ Il y a une vingtaine de supermarchés dans un rayon de 1 km autour de chez moi et les primeurs de quartier ont toujours été bien achalandés.
3/ Les paniers d’invendus de produits frais se sont multipliés et diversifiés.
4/ Je vis dans un réseau de solidarité qui me rassure sur mes approvisionnements et ma Ville (Paris) sait être efficace en cas de crise.
5/ Je ne mange pas tant que ça.