[Blogue V1 2010-2022 – Réédition]
« Comme l’honneur — ou la honte, son envers, dont on sait que, à la différence de la culpabilité, est éprouvée devant les autres —, la virilité doit être validée par les autres hommes, dans sa vérité de violence actuelle ou potentielle, et certifiée par la reconnaissance de l’appartenance au groupe des « vrais hommes ». Nombre de rites d’institution, scolaires ou militaires notamment, comportent de véritables épreuves de virilité orientées vers le renforcement des solidarités viriles. Des pratiques comme certains viols collectifs des bandes d’adolescents — variante déclassée de la visite collective au bordel, si présente dans les mémoires d’adolescents bourgeois — ont pour fin de mettre ceux qui sont à l’épreuve en demeure d’affirmer devant les autres leur virilité dans sa vérité de violence, c’est-à-dire en dehors de toutes les tendresses et de tous les attendrissements dévirilisants de l’amour, et elles manifestent de manière éclatante l’hétéronomie de toutes les affirmations de la virilité, leur dépendance à l’égard du jugement du groupe viril. »
Pierre Bourdieu La domination masculine, Paris, Seuil, cité dans L’identité masculine. Permanences et mutations, n° 894, novembre 2003, de Problèmes politiques et sociaux (Dossier réalisé par Françoise Rault)
Merci Isabelle pour cette référence qui a bien sa place en Hétéronomie !
Si vous voulez une « version courte », voici l’article signé par Bourdieu dans le Monde diplomatique en août 1998, il y a quinze ans. Ce qui me surprends, c’est que ce texte est assez méconnu, par moi la première qui ne l’ai découvert que récemment. Il est pourtant si essentiel…