Aspirateur

L’autre jour, j’ai eu la visite d’une amie aveugle. Il était prévu qu’elle passe en fin de matinée boire un café, puis que je l’accompagne à la gare Montparnasse. Dès que j’ai été levée, mon occupation principale a été de ranger mon appartement et de passer l’aspirateur. J’ai plié le linge qui séchait sur le Tancarville que j’ai remisé. J’ai descendu le sac d’emballages destiné au bac jaune. On peut considérer qu’il s’agissait là simplement de faire un peu de place et de lui éviter certains obstacles.
Mais, dans le même temps, j’ai un peu mis d’ordre sur mon bureau, trié les habits que je laisse volontiers traîner dans un coin sur mon lit, fait la vaisselle, dégagé le guéridon de ce qui l’encombre, donné un coup d’éponge sur le lavabo de la salle de bains, les toilettes et passé l’aspirateur. Chacun sait que je n’aime pas faire le ménage, et les visites me sont toujours l’occasion d’en faire un petit peu avec l’idée que c’est plus agréable pour tout le monde d’être dans un appartement relativement propre.
Cela n’a pourtant rien de systématique. Frédéric est venu il y a deux jours et je n’ai pas passé l’aspirateur. J’ai fait le pavé de ma cuisine qui en avait grand besoin. Mais je n’ai pas fait la vaisselle. Il est vrai que mon intimité avec Frédéric est supérieure à celle que j’ai avec cette amie aveugle. D’un autre côté, elle n’y aurait vu que du feu si je n’avais pas consacré cette petite heure au ménage… Aurais-je craint que la recevoir dans « un bouge » ait été une manière de stigmatiser sa cécité ? Sa chienne d’assistance aurait pu cafter ; je ne risquais rien, elle m’adore !
Alors ?