Dark romance

Libération a publié récemment deux articles sur la « dark romance » dont celui-ci (réservé aux abonnés). Je vous renvoie à un article de Wikipédia en accès libre pour une définition de ce sous-genre littéraire qui fait jaser mais est suffisamment populaire pour avoir sa sélection sur le site du Parisien. Une question de fond se pose : comment des femmes peuvent-elles accepter de lire des livres où la violence, notamment sexuelle, les asservit ? Dans ce que j’ai lu de témoignages et d’analyses, je comprends qu’il s’agit là de fantasmes et nullement d’une envie de vivre réellement toute forme d’assujettissement.
Cela ne me choque pas. Dans mon roman Mathilde, je l’ai rencontrée dans un train, et dans mes romans roses, je n’ai pas rechigné à écrire certaines scènes qui sortent de l’ordinaire sexuel tout en faisant très attention à ce que mes héroïnes soient toujours explicitement consentantes. J’ai écrit des scènes qui peuvent être considérées comme pornographiques, et qui sont considérées comme tel par certaines femmes mais, hormis une scène dans Piste rose, je ne pense pas avoir écrit des choses violentes. Je ne l’ai en tout cas jamais voulu.
L’article de Libération que je cite donne la parole à Gillian Anderson qui a compilé des lettres qu’elle a sollicitées évoquant les fantasmes de leur autrice. J’étais très enthousiaste au début de cette lecture, ravie de pouvoir confronter mes propres fantasmes à ceux d’autres femmes. J’ai très vite été déçue, lassée, même si je suis allée au bout du livre toujours en quête de quelque chose que je pourrais m’approprier.
L’homosexualité n’est pas en cause car une bonne partie des témoignages y fait référence, même s’il s’agit plus de relations entre femmes que véritablement d’homosexualité. Non, j’ai été déçue car, finalement, j’ai trouvé que ces femmes n’avaient pas beaucoup d’imagination. Je leur accorde volontiers que le problème en matière de sexe est que, finalement, on en fait vite le tour et que notre attachement au scénario plus qu’aux actes tient sans doute à cela.
Quand j’avais conçu Cul nu, courts érotiques, j’avais fait un tableau pour croiser pratiques sexuelles, circonstances, sujet-objet pour essayer de couvrir le maximum de champs. Il m’avait vraiment fallu jouer des nuances pour obtenir un éventail suffisant. Et cela ne va pas très loin. Est-ce la raison pour laquelle on peut avoir besoin de toujours plus d’interdits (toujours plus gros, toujours plus fort) pour garder un minimum d’excitation et de désir ? Et l’amour dans tout ça ? Je n’ai décidément pas de réponse à cette question.